La batellerie de Loire
Comment, en étant ligérien, ne pas être attiré par ce qui a été et qui reste encore la navigation sur la Loire. Aussi durant tout l’été dernier, appareil photos en bandoulière, je me suis promené au bord de la Loire et du Cher à la recherche de toues, gabares et autres futreaux pour connaître un peu mieux l’histoire de la navigation sur la Loire.
En cette période un peu creuse pour notre loisir je me décide enfin à vous emmener en voyage pour une promenade ensoleillée au bord du fleuve royal.
Les guirouets.Un simple morceau de chiffon accroché à un hauban suffit amplement et efficacement pour donner la direction du vent. Le « girouet », « guirouet » « guirouée » reste un instrument majeur de la navigation à voile. Lors de fêtes honorant un saint patron des bateliers, on porte le guirouet en procession.
Aujourd’hui il est réalisé en bois polychrome ou en bois brut, ce complément du mat est le fleuron du bateau.
Objet décoratif, parfois véritable œuvre d’art populaire, il est la fierté du patron et de son équipage.
Découpée autrefois au couteau lors de arrêts forcés, celle-ci est presque toujours ornée de symboles de batellerie. Elle peut porter aussi les initiales d’un être cher ou tout autre signe personnel dû à l’esprit artistique de son créateur.
Prolongé d’une flamme aux couleurs de son port d’attache, de sa région, de l’association, le girouet est personnel et reste la propriété de son maître, même en cas de vente du bateau.
Les plaques des bateaux.Comme tous les bateaux du monde, les bateaux de Loire portent sur leur coque, leur nom de baptême. C’est une pratique qui dure depuis des siècles.
Les bateliers de Loire ne failliront pas à cette tradition, aussi on relèvera des prénoms d’êtres chers ou parrain, marraine du bateau, et des noms de saints protecteurs. Apparaissent de même ceux de leurs régions, de leurs villes. Le caractère de son propriétaire ou la particularité physique peut aussi faire référence. Sans parler des jeux de mots ou les calembours.
Quel qu’il soit, le nom choisi par le propriétaire devient, pour lui et l’équipage, un nom propre comme celui d’une personne ou d’un animal domestique. Généralement, quand un bateau est revendu, on ne change pas son nom, peut-être par superstition.
Aujourd’hui encore, la tradition se perpétue et le baptême est un moment de fête et de convivialité pour les équipages. Avec ou sans bénédiction, l’embarcation reçoit un peu de vin de la région, lequel vin sera bu également par les bateliers. Le bateau sera bien arrosé, c’est sûr.
Voilà pour cette première partie, en espérant vous avoir fait passer un bon moment. La suite sera consacrée aux bateaux en ballade et leur fabrication.
Un livre à ne pas manquer : des hommes et des bateaux sur la Loire. Jean Bourgeois et Hubert Pasquier.
Je tiens à préciser que toutes les photos sans aucune exception sont sorties de la carte mémoire de mon Nikon.
Pendant des siècles la Loire fut en France le fleuve le plus utilisé, le transport des marchandises y étant favorisé par l’importance du bassin de la Loire qui couvre 1/5 du territoire de la France.
Sur la Loire les embarcations étaient nombreuses et variées. Toutes avaient le fond plat pour éviter de s’échouer sur les bancs de sable et leur tirant d’eau était faible. On pouvait distinguer :
• Les toues cabanées en particulier sur les barrages à saumons.
• Les gabares, les plus importants par leur gabarit
• Les futreaux, plus petits que les chalands
• Les sapines, construites rapidement en sapin comme leur nom l’indique, sans gréement, qui ne faisaient qu’une seule descente, et vendues au terme de leur voyage.
Aujourd’hui il existe encore des hommes capables de construire et de faire naviguer de tels bateaux et des passionnés bien décidés à ne pas laisser ce savoir-faire tombé dans l’oubli.
Le samedi, les jours de congés, parfois les vacances, des hommes consacrent leur temps à fabriquer ces bateaux perpétuant ainsi la tradition. Ce sont tous des bénévoles, beaucoup sont charpentiers mais d’autres ont des métiers n’ayant aucun lien avec la batellerie. Juste pour la passion, le plaisir.
La mise en route d’un bateau n’est pas une chose prise à la légère, cela demande beaucoup de documentation, mais surtout beaucoup de temps. Ces bateaux la plupart du temps sont financés par la région, la commune mais aussi la patrimoine national. La construction d’un bateau demande plusieurs années, il est fait à l’identique. La restauration est aussi de mise.
C'est en 1992 que fût construit par les bateliers du Cher le premier bateau, et qui est à l'origine de l'extension de la construction de bateaux traditionnels.
La Saponaria (son nom vient de Savonnières où il fût construit et où les habitants s'appellent les Saponariens) fût en quelque sorte le bateau amiral de la flotte. Malheureusement il fût détruit d'une manière criminelle en 2009.
Mr Julien, l'ainé des bateliers du Cher, menuisier à la retraite est l'un des constructeurs de la Saponaria en 1992.
Je suis allé retrouver un samedi après-midi ces hommes qui petpétuent la tradition. J'y ai rencontré Jean-Pierre Delaunay en train de creuser l'emplacement de la poulie sur un mât. L'homme est joviale, habitué à poser pour la postérirté. Il explique volontiers aux enfants qui viennent le voir, son travail le tout avec le sourire.
La scie sauteuse et autres meuleuses ont remplacé les outils de l'époque aux noms poétiques : Chapoteau, Chèvre, Guipon, zague.
On restaure aussi le samedi après-midi au bord du Cher dans la bonne humeur, ces gens-là ne travaillent pas, ils assouvissent leur passion avec plaisir.
Voilà le dernier encore en construction pour de longs mois.Sur la berge d'en face, un chantier pour mettre à l'eau les Drakkars construits aussi à Savonnières.
Les bateaux traditionnels prennent une place importantes dans le tourisme de notre belle région, mais sans les hommes qui perpétuent la tradition rien de cela n'existerait. J'espère que comme moi vous découvrirez avec plaisir ces bateaux et ces hommes.
La prochaine fois je vous le promets les bateaux seront construits et sur l'eau.
Rien d’étonnant de découvrir aujourd’hui encore tout du long de la Loire des bourgs portant le nom de ports. Ils servaient d’étapes pour la navigation, c’est là que se chargaient et déchargaient les marchandises transportées. Certains bateaux faisaient escale aussi pour quelques rénovations.
Voici quelques uns des panneaux existant encore, et dont les noms sont familiers à ceux qui de nos jours empruntent en voiture la levée de la Loire entre Tours et Saumur.
Hier, la Loire et les rivières de Touraine connaissaient un trafic intense. Toues, gabares et fûtreaux se côtoyaient. Une navigation parfois difficile avec en été les bancs de sable qu’il fallait éviter, et en hiver affronter les crues, hâler le bateau quand le vent manquait, et manoeuvrer avec adresse pour passer les ponts.
Que reste t-il aujourd’hui de ces bateaux de bois. Il existe encore des hommes capables de construire et de faire naviguer de tels bateaux. Ce sont des passionnés bien décidés à ne pas laisser ce savoir-faire dans l’oubli.
La flotille de Savonnière sur le CherEn bois brut le dernier des bateaux construit à Savonnière. Il aura donc fallu quatre ans de travail pour reconstruire ce Scute, à l'ancienne : sans clous, ni vis, ni boulons (on désigne sous le nom de Scute, un grand nombre de bateaux à fond plat, aussi bien fluviaux que côtiers, typiques du Moyen Age).
Les recherches menées par François Beaudouin, à partir de quelques vestiges réunis par l'écomusée de Montjean-sur-Loire, ont permis à l’association des Bateliers du Cher de fabriquer ce bateau, en faisant appel aux techniques et aux gestes ancestraux. Les planches de chêne ont été assemblées à clins, avec des chevilles, et calfatées à la mousse végétale.
A la fois tonnelier et en même temps chargé de faire passer d'une rive à l'autre charettes, chevaux et passagers. Les tonnaux étaient alignés et calés dans le milieu plat du bateau.